Hostiles

Cette semaine je suis en surveillance de bac blanc.

18 heures.

18 longues heures de silence et de coups d’œil en coin.

18 interminables heures à regarder plancher des gamins plus ou moins inspirés, plus ou moins stressés par un bac totalement désacralisé.

C’est long, c’est chiant mais sociologiquement, c’est intéressant…

Face à des élèves de terminale scientifique, mes consignes sont écoutées, presque religieusement tant on craint de commettre la faute qui fera péricliter tant de mois de souffrance scolaire.
Face à mes compta/gestion, il faut batailler parfois même aboyer pour que l’on s’installe dans le calme, que l’on accepte d’écouter.

En terminale S, tandis que j’affuble les tables de copies triées par couleurs, on trépigne derrière la porte, on me supplie d’entrer.

Face à mes STG, c’est ostensiblement que l’on arrive en retard, qu’on force sur la porte en essayant, sourire en coin, de me faire croire qu’on a l’aval de la direction pour entrer.

Face à des scientifiques, c’est le regard pétillant qu’on me regarde sortir de mon sac le Mac qui me servira à écrire cette chronique. Je possède l’objet convoité par la tribu, je suis une des leurs. Nous sommes de complices consommateurs et de communs penseurs.

Avec mes STG en revanche, quand je sors  ce que mes élèves savent pourtant être mon outil de travail, c’est un regard type « lutte des classes »  que l’on m’envoie, la convoitise comme une bataille, on ne me reconnaît pas, on ne me veut pas dans la tribu.

Et c’est ce regard là qui soutient mon regard, mâchonnant bouche ouverte comme pour me signifier leur envie d’en finir avec cette épreuve qui les tient prisonniers quelques minutes encore.

Certains naïfs ou résistants oseront redemander une copie sous les sourires moqueurs des copains de mutinerie.

C’est une épreuve de bac. Arrivés en retard, ils seront tous partis deux heures avant la fin prévue, méprisant l’idée même de devenir bacheliers.  Tandis qu’en section scientifique c’est avec autorité qu’il me faudra presque arracher leur copie à des petits doigts tout cramponnés.

C’est dur mais c’est ainsi. Même attitude mais combat inégal. Et je cherche à comprendre qui de la vie, de l’école  ou de la cité leur a laissé entendre qu’il fallait se mépriser pour mieux avancer…

Comments

[GabTiB]

Etre bachelier à notre époque est-ce que cela signifie quelque chose?

Les STG ont leur fait bien comprendre qu'ils ne sont que de la m----, alors je comprends leur réaction.

Mais bon certains s'en sortiront peut être, faut esperer..